" Raoul Dufy, l’ivresse de la couleur "
et
" Zones de Fusion "
Deux visites étaient au programme de cette fin juin pour les adhérents de la MAC’A : Raoul Dufy, à l’Hôtel de Caumont à Aix-en-Provence et « Zones de fusion », à Châteauneuf-le-Rouge.
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Raoul Dufy, une exposition estivale joyeuse et colorée
L’hôtel de Caumont présente cet été « Raoul Dufy, l’ivresse de la couleur », une rétrospective des nombreuses techniques avec lesquelles l’artiste s’exprime : l’huile, l’aquarelle, le dessin, la gravure, la céramique, etc..
Né au Havre, à ses débuts Raoul Dufy (1877-1953) flirte avec les courants du moment. Ses sujets de prédilection sont alors les ports, les bateaux, les paysages côtiers, les baigneuses. A cette époque, il est plutôt influencé par l’impressionnisme.
Pendant un séjour à Martigues au début des années 1900, il peint de nombreuses toiles de la ville et de ses canaux. Suite à l’exposition Matisse du Salon d’Automne de 1905, il rejoint le groupe historique du fauvisme. Son leitmotiv : la lumière va passer par la couleur .
En 1907, lors de la rétrospective Cézanne, il décide de marcher dans ses pas et abandonne alors le fauvisme. 1908 marquera le début de sa période « cézannienne ». Plutôt habitué à peindre sous le bleu laiteux du ciel normand, Raoul Dufy part enrichir sa palette sous le soleil de Provence où il sera rejoint par Georges Braques. On perçoit très vite l’influence de Cézanne dans son travail. Dans ses paysages de L’Estaque, il s’affranchit des aplats pour créer des compositions en étagement, en plongée.
L'Apéritif / Paysage / Pins à L'Estaque (aquarelle)
Quand il aborde la nature morte, il travaille alors par touches directionnelles et « cernage » au pinceau en noir. Sa gamme chromatique devient criarde, le style Dufy commence à poindre.
Toujours influencé par Cézanne, son dessin devient plus souple, notamment pendant son séjour à Hyères (1913). N’oublions pas que si Raoul Dufy est un grand coloriste, il est aussi un grand dessinateur. Mais il n’est pas un suiveur. Il est avant tout dans la modernité. Son œuvre « la Tour Blanche » (1913) marque le début de « la patte » de Dufy.
« Le jardin abandonné », représentant le Jardin des Plantes à Paris, est une pièce pivot de son travail. C’est moins le motif que les lignes, les volumes et leur imbrication qui motive l’œuvre.
Hyères / Nature morte à la tour blanche / Le jardin abandonné / Maison et jardin
Deux maîtres-mots : Couleur – Lumière
1919 - 1924. Que ce soit avec « Vence » ou « La jetée-promenade à Nice », l’artiste est déjà dans la simplification des formes, mettant la notion couleur/lumière en vedette, prémices de son nouveau style.
Dans son œuvre sur Nice il atteint la pleine maturité avec les couleurs vives de sa nouvelle palette et son retour aux aplats. En ajoutant le surlignage, il cherche à dissocier la couleur et le trait. Priorité encore à la couleur/lumière.
Nus et baigneuses dans l’atelier
Au 2éme étage du musée, focus sur les sujets de prédilection de l’artiste :
« L’atelier du peintre » est un thème très apprécié du visiteur. Dans cet exercice, Raoul Dufy donne à voir son univers personnel. On l’imagine très bien en train de peindre, la fenêtre donnant sur le monde extérieur. Dans celui de Perpignan (entre 1940 et 1949), l’espace est baigné de soleil, inondé de teintes chaudes orangées, preuve de l’influence du climat méridional sur sa palette.
L'atelier à la fenêtre / L'atelier au torse / Le modèle
Et nous voici maintenant face à « La grande Baigneuse » (1914), qui trône en majesté. Impressionnante dans ses dimensions comme dans sa facture, elle est considérée comme le chef-d’œuvre de sa période cézannienne. A côté de cette œuvre monumentale, on peut apprécier la finesse d’une des études. Dans la même salle, une série de nus plus discrets habille le mur latéral.
Fleurs et bouquets champêtres
Pendant sa période fauve, Raoul Dufy a toujours montré un grand intérêt pour les fleurs. Déjà dessinateur de grande qualité, il excelle dans ces exercices de fioritures, d’arabesques, usant d’une palette aux nuances infinies. Dans les années 40, son environnement champêtre sera une source inépuisable d’inspiration.
« Le peintre a besoin d’avoir sans cesse sous les yeux une certaine qualité de lumière, un scintillement, une palpitation aérienne qui baigne ce qu’il voit »
L’exposition se termine par une animation vidéo autour de " La Fée Électricité ", une façon de rendre hommage au Musée d’Art Moderne de Paris pour ses nombreux prêts.
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Pour la suite de la journée, direction Châteauneuf-le-Rouge à une quinzaine de kilomètres d’Aix.
Le verre au service de l’Art Contemporain
ARTEUM Musée d’Art Contemporain a investi les salles du château pour l’exposition « Zones de fusion ». Christiane Courbon, directrice et commissaire d’exposition, a réuni un collectif de jeunes créateurs, tous issus des écoles d’Art, qui s’approprient les techniques traditionnelles et ancestrales du travail du verre.
Ces artistes verriers, par leurs recherches, leurs créations et leurs installations offrent une place de choix au verre dans l’Art Contemporain. Qu’ils le soufflent à la canne ou au chalumeau, le gravent ou le sablent, ils créent des œuvres d’art.
Le verre est certes fragile mais malléable et, avec ces pratiques réinventées, il offre une grande liberté de création et un large éventail de manipulations : accumulation, bris, dissolution, déformation, association à d’autres matériaux.
L’exposition se décline au fil de petites salles qui offrent à chaque artiste un espace dédié.
Pour eux, ce matériau fascinant devient un médium avec lequel ils peuvent exprimer leurs interrogations, leurs réflexions, leurs problématiques, voire leurs révoltes.
Voici un aperçu de certaines des œuvres exposées.
Arnaud Vasseux : Création avec la complicité d'un souffleur.
« Urne antique » en verre et autres formes réalisées en verre, remplies de plâtre photographique. Le plâtre gonfle, le verre éclate plus ou moins et laisse des traces.
On remarque que le verre est absent du résultat mais il fait totalement partie du processus de création. Teinté aux oxydes, le plâtre est marqué par l'empreinte et les fissures de l'enveloppe de verre avant qu'elle ne se brise.
Françoise Vergier
- « Dans ces eaux là » . Verre thermoformé sorti du moule encore mou ce qui donne une forme aléatoire. Maintenu par un support en bronze.
Sati Mougard
- « Mandragore » . Pâte de verre et cristal dichroïque. Sous la chaleur de la lampe à huile l’œuvre change de couleur
Ici, l’artiste utilise le verre pour parler de l’invisibilité de la femme en Inde. En effet, là-bas, le bas de son corps est considéré comme impur. Sati Mougard renverse la donne en mettant en évidence les pieds.
- « Le jour après la nuit ». Série de disques de verre plats, issus de la pratique même du soufflage. Dans son installation l’artiste aborde l’objet comme un Soleil, du lever au coucher. Les disques, de tailles différentes, disposés sur un monticule de sable symbolisent le Ciel et la Terre, et une vidéo met en scène l’Homme qui cherche son équilibre.
- « Butin ». Ces 3 œufs en verre font référence à " L'Œuf de Fabergé" pour symboliser la préciosité de l’œuvre. L’artiste a fait entrer dedans des abeilles où ces petites ouvrières ont fait le minutieux travail d’architecture et de sculpture dont elles sont coutumières. Pour l'artiste, c'est sa façon de conserver, sauvegarder et respecter le travail des abeilles, d'en faire une sorte de reliquaire.
Bettina Samson
- « Série Contre jour ». Le travail de l’artiste consiste à graver, par sablage, dans l’épaisseur d’une plaque faite de plusieurs couches de verre de couleurs différentes. En quelque sorte, elle sculpte le verre.
Julie Balsaux
- " Infrangibles ". Dans cette œuvre, l’artiste exprime sa révolte, les pavés de mai 68 en étant le symbole. Réalisés en pâte de verre de différentes couleurs, ils renferment l’empreinte d’événements ou de situations qui engendrent sa colère : le sort réservé aux femmes dans de nombreux pays ; la noyade d'enfants migrants au large de Lesbos, etc. Le socle, qu’elle appelle "sa Tour de Babel", est fait de miroirs qui intègrent le visiteur dans l’œuvre.
- "Vulvéa". L'œuvre , en pâte de verre, est une pièce de provocation. Poussant le bouchon encore plus loin, Julie Balsaux présente son œuvre dans le noir où elle devient luminaire, avec à côté un gel hydroalcoolique pour inviter le visiteur à la toucher. C'est aussi une façon de polir le verre...
- "Pussy Riot". Œuvre créée en hommage au mouvement féministe punk russe durement réprimé et condamné en 2012.
Et voici la fin de cette belle journée de découverte. Le groupe de la MAC’A a eu la chance de rencontrer deux des artistes, Julie Balsaux et Sati Mougard, ce qui a rendu la visite encore plus passionnante. Cette très belle exposition inédite se terminant le 9 juillet, ALLEZ-Y VITE !
A bientôt !